L’eau du puits ~
~~ Dragon Ball - Boy of The Wild (Yasei No Shounen)
Notre héros éprouva une immense satisfaction. Lui qui n’était personne et qui n’avait personne, il était devenu un nuage gris et avait même fait la connaissance d’un autre être comme lui. Peut-être serait-il son premier ami ? C’était ce qu’il s’imaginait en tout cas.
Néanmoins, de nombreuses questions restaient encore en suspens et il n’allait plus tarder à les lâcher :
— Il y a beaucoup de choses que j’aimerais vous demander, Baadal !
— Appelle-moi Ancien Baadal… ou plutôt Oncle Baadal, répondit le vieux bonhomme. C’est comme cela que la plupart m’appellent.
— D’abord, qu’est-ce que cela veut dire « Ancien » ?
— Ce sont les villageois les plus âgés, on leur donne ce titre par respect.
— Très bien… Ancien Baadal alors !
Le vieux borgne sourit discrètement.
— Dites-moi qu’est-ce qu’un nuage gris exactement ? demanda ensuite notre voyageur. Pour quelle raison suis-je ici, sur cette terre ? Et aussi qu’est-ce qu’il y a en haut de cet escalier ?
— Tu en demandes beaucoup, toi ! Enfin, je peux te dire qu’au sommet se trouve le village de Nephelia, un grand village nuage. C’est là d’où je viens.
— Village nuage ? Est-ce que cela veut dire qu’il y a d’autres gens comme moi là-bas ?
— Eh bien, je suis désolé mais non ! D’ailleurs, je ne pense pas que ça soit une bonne idée de te rendre à Nephelia…
— Quoi ? Pourquoi ? Cela fait des jours que je marche pour rien ! Je ne vais pas rebrousser chemin ici tout de même ! Et puis qu’est-ce que vous êtes au juste, vous ?
Baadal resta silencieux. Il fixait le visage du voyageur comme s’il cherchait à sonder son âme. A priori, il ne semblait pas du tout à l’aise à l’idée que le nuage gris entre à Nephelia. Était-ce parce qu’il n’avait pas confiance ou alors… dissimulait-il quelque chose ?
— Je suis un nuage, moi aussi, déclara-t-il finalement.
Cette fois-ci, c’est notre marcheur qui tira une expression étrange. Il releva ses sourcils et laissa sa bouche grande ouverte. Il semblait profondément choqué d’apprendre que Baadal était lui aussi un nuage… choqué et déçu.
— Attendez, vous voulez dire que… je vous ressemble ? demanda le nuage gris.
— Eh bien, dans un sens, oui, dit Baadal en souriant. Nous sommes tous deux des nuages.
— Non… ce n’est pas possible… JE NE VEUX PAS !
En entendant ces mots, le visage de l’Ancien Baadal changea si brusquement que le nuage gris prit peur. On pouvait bien voir la colère affichée sur sa face. « Faire entrer cet effronté gris dans mon village ? Plutôt mourir ! » C’était ce que son regard disait.
— Je ne suis pas un nuage gris, je suis un nuage BLANC ! s’écria-t-il. Ne le vois-tu pas, sombre idiot ? Tiens, je trouve que ce nom te va plutôt bien d’ailleurs… SOMBRE IDIOT !
— Non, attendez, attendez, Ancien Baadal ! bafouilla notre héros, regrettant les mots sortis trop vite de sa bouche. Ce n’est pas ce que je voulais dire… Je ne suis qu’un ignorant après tout !
— Très bien, puisque c’est comme ça, je vais te montrer ta tête, soupira le vieux nuage. Suis-moi, sombre idiot !
Alors, sans se poser de questions, le nuage gris le suivit. Ils descendirent jusqu’à un point de rupture du grand escalier. À cet endroit, la pente était moindre et, à quelques mètres, il y avait un puits de pierre qui paraissait vieux comme le monde. Juste avant, notre marcheur était passé à côté sans le voir. Il était trop obnubilé par ces présences qui venaient d’en haut…
— Tu sais ce que c’est ? lui demanda l’Ancien.
— C’est étrange mais, oui, je sais ce que c’est ! C’est un puits à eau, non ?
— Oui. C’est normal que tu le saches. Nous avons tous plus ou moins de connaissances innées… Bon, allez, va regarder à l’intérieur ! Il doit être plein à ras bord en ce moment !
Encore une fois, Baadal donnait l’occasion au nuage gris d’en apprendre un peu plus sur lui-même ! Il était difficile d’y voir clairement à cause de la lumière du jour mais le nuage gris réussit à voir l’essentiel de son apparence.
Il découvrit son visage, sa peau grise, ses cheveux noirs et fumants. Il ouvrit la bouche pour voir son reflet reproduire son geste et se mit ensuite à bouger et à grimacer n’importe comment. On aurait dit un bébé devant un miroir. Il ressentait encore ce même sentiment d’accomplissement, le même qu’il avait ressenti en apprenant qu’il était un nuage gris !
— Ancien Baadal, merci ! s’exclama-t-il, plein d’entrain. Grâce à vous, j’en ai appris beaucoup sur moi-même. Vous êtes un véritable bienfaiteur !
— Allez, allez, pousse-toi et laisse-moi prendre mon eau maintenant.
Bien qu’il ne le montrât pas, Baadal fut flatté par les paroles du nuage gris. Enfin, il alla plonger ses deux bras dans le puits. Dès lors, un curieux bruit se fit entendre. On aurait dit le bruit de cent bouilloires. Alors, Baadal ricana. Il semblait préparer un mauvais coup…
Notre nuage recula de quelques pas. Pour la première fois, il ressentit de la méfiance… Peut-être avait-il fait une erreur en suivant ce vieillard.
— N’aie pas peur, gamin ! s’exclama Baadal pour le rassurer. Ce n’est rien…
— Qu’est-ce que vous faites ?! demanda le nuage gris, l’air terrifié.
Aucune réponse. Après quelques secondes, le son finit par s’estomper. Baadal se tourna vers le nuage gris, il leva doucement le bras, ouvrit sa main comme pour montrer sa paume et, en une fraction de seconde, notre héros sentit une vive vague de fraîcheur lui traverser le corps. Sous le choc, il tomba à la renverse.
Il resta assis sur le sol à se demander ce qui venait de se passer, immobile et complètement trempé. Baadal, qui se retenait, finit par s’esclaffer comme un fou en voyant la tête ahurie que faisait l’être gris. Ce dernier ne semblait pas avoir envie de rire. Il tremblait…
— Que m’avez-vous fait, vieillard ?! s’écria-t-il soudain.
— Allons, allons, calme-toi, petit ! Je t’ai juste envoyé un peu de namia dessus. Ce n’est que de l’eau et elle est froide car elle vient du puits. Tous les nuages savent faire ce tour-là !
— Le namia ? dit le nuage gris en changeant brusquement de ton.
— Oui, le namia ! s’exclama Baadal en continuant à rire doucement. On parle du vaha pour l’air, du jimen pour la terre, de l’aatish pour le feu et, enfin, du namia pour l’eau.
— Je peux le faire moi aussi ?!
— Calme ton enthousiasme ! Il y a un moment, tu étais dégoûté à l’idée de me ressembler et, maintenant, tu veux que je t’apprenne à utiliser le namia ? Tu te fiches de moi ou quoi ?
Le vieux nuage était passé du rire au grognement en une fraction de seconde. La remarque insolente du nuage gris lui était bel et bien restée en travers de la gorge. Il fallait à tout prix que notre jeune marcheur se rattrape !
— Je n’ai jamais dit que vous me dégoutiez ! dit-il donc. Vous êtes la première personne que je rencontre sur cette terre et j’en suis honoré. Vous m’avez déjà permis d’en apprendre beaucoup, j’aimerais juste en apprendre davantage ! J’ai besoin de savoir qui je suis et pourquoi je suis ici ! M’aiderez-vous, Ancien Baadal ?
Les yeux du « sombre idiot » brillaient comme s’il se trouvait devant un trésor. Il semblait sincère… Il l’était. Il ressentait réellement le besoin de savoir. Il continua de regarder Baadal avec ce regard émerveillé durant un long moment, si bien que l’Ancien prit sa décision :
— D’accord, gamin. Viens avec moi !
— Où est-ce que nous allons cette fois ?
— Au village Nephelia !
Le nuage gris sourit à pleines dents pour la première fois depuis sa naissance…
« Contre toute attente, Baadal accepte d’amener le nuage gris à son village.
Là-bas, un accueil spécial l’y attend ! »